Anarchie

Le « A » cerclé, dans deux styles différents, symbole[1] de l'anarchisme, indépendamment du courant concerné.
Représentation des différentes phases de la révolution ouvrière avant l’avènement de l'anarchie - affiche de la CNT, 1930

L’anarchie, ou société libertaire, est une société fondée sur la démocratie directe sans système de pouvoir vertical tel qu'un gouvernement non soumis au peuple (anarchistes prônent le mandat impératif et le référendum d'initiative populaire), une économie d'exploitation (refus de l'existence du salariat, des monopoles, des cartels, du capitalisme d'État) ou une religion d'État. C'est la situation d’un milieu social où il n’existe pas de rapports de pouvoir verticaux et qui est de ce fait dépourvu de classes sociales. Il existe toujours une organisation, un ordre et une loi, mais ces derniers émanent directement du peuple et non d'une entité de domination distincte qui serait dotée d'un pouvoir de coercition hors de la société elle-même.

Le terme anarchie provient du grec ἀναρχία / anarkhia, composé de an, préfixe privatif : absence de, et arkhê, commandement, pouvoir, autorité[2]. De nos jours, il est polysémique au point d'avoir des sens non seulement différents, mais absolument contradictoires[3]. Employé péjorativement par ses détracteurs, il y est synonyme de désordre social, ce qui est plus justement désigné comme anomie. À l'opposé, pour les anarchistes, l'anarchie est un but à atteindre désirable et pratique.

En 1840, Pierre-Joseph Proudhon est le premier à se réclamer anarchiste[4],[5], c'est-à-dire partisan de l’anarchie, entendu en son sens positif[6]. À l'origine, ne faisant que se réapproprier l'insulte qui était proférée à l'égard des républicains de son époque : « La liberté est anarchie, parce qu'elle n'admet pas le gouvernement de la volonté, mais seulement l'autorité de la loi, c'est-à-dire de la nécessité »[7],[8]. En 1987, Jacques Ellul précise : « plus le pouvoir de l'État et de la bureaucratie augmente, plus l'affirmation de l'anarchie est nécessaire, seule et dernière défense de l'individu, c'est-à-dire de l'Homme »[9].

Pour les anarchistes, l’anarchie est l'ordre social absolu[10], grâce notamment à la socialisation des moyens de production : contrairement à la norme capitaliste de possessions privées, elle suggère celle de possessions individuelles ne garantissant aucun droit de propriété, notamment celle touchant l'accumulation de biens non utilisés[11]. Cet ordre social s'appuie sur la liberté politique organisée autour du mandatement impératif, de l'autogestion, du fédéralisme libertaire et de la démocratie directe. L'anarchie est donc organisée et structurée : c'est l'ordre moins le pouvoir[12].

En 1850, Anselme Bellegarrigue publie L'Anarchie, journal de l'ordre[13]. Pour ses partisans, l’anarchie est un système bien organisé et structuré : c’est selon les mots d’Élisée Reclus « la plus haute expression de l’ordre »[14].

  1. « Non, le "A" entouré d'un cercle, toujours anarchiste, n'a jamais été un symbole d'extrême-droite », sur France Culture, (consulté le )
  2. Catherine Malabou, Au voleur ! Anarchisme et philosophie, Paris, PUF, , 408 p. (ISBN 978-2-13-082544-9)
  3. A. Rang, Anarchie, Encyclopédie générale, dir. Louis Asseline, volume 2, 1869, p. 142-144.
  4. Guy Hermet, Bertrand Badie, Pierre Birnbaum et Philippe Braud, Dictionnaire de la science politique et des institutions politiques, Armand Colin, , 320 p. (ISBN 978-2-200-25624-1, lire en ligne)
  5. (en) Encyclopædia Britannica : I am an anarchist et Property is theft!.
  6. Michael Paraire, Proudhon, fondateur de l’anarchisme ?, Alternative libertaire, no 180, janvier 2009, texte intégral.
  7. Encyclopédie Universalis : Pierre-Joseph Proudhon.
  8. Maurice Barbier, Le mal politique : les critiques du pouvoir et de l'État, Paris, Éditions L'Harmattan, , 179 p. (ISBN 2-7384-5770-3 et 9782738457707, lire en ligne), p. 113
  9. Jacques Ellul, Anarchie et Christianisme, Atelier de création libertaire, 1988, page 27.
  10. « Oui, l’anarchie c’est l’ordre ; car, le gouvernement c’est la guerre civile », Anselme Bellegarrigue, « Le gouvernement c’est la guerre civile & Le pouvoir c’est l’ennemi du peuple », sur partage-le.com, .
  11. Ely, Richard et al. 'Property and Contract in Their Relations to the Distribution of Wealth' The Macmillan Company (1914).
  12. Pierre Kropotkine, « L'ordre », sur panarchy.org, .
  13. Raoul Vaneigem, Anselme Bellegarrigue, Encyclopædia Universalis, lire en ligne.
  14. Élisée Reclus, Développement de la liberté dans le monde,

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