Art africain traditionnel

« Dame blanche » (vers 4000 AEC) peinture rupestre. Culture des « Têtes Rondes ». Ocre rouge, et blanc, 100 × 150 cm. Aouanrhet. Tassili n'Ajjer, Algérie. Copie, Musée de l'Homme[1]
Statues d' "hommes barbus" (?). Culture de Nagada, 3800-3100 AEC. Égypte antique. Schiste et brèche, H. 50 et 31,4 cm. Musée des Confluences
Personnage reposant son menton sur son genou. Terre cuite, H. 38 cm. Art Nok (500 AEC- 500 EC). Nigeria. Pavillon des Sessions, Louvre
Statuette de femme. Culture archéologique de Djenné, Mali, entre le XIIIe et le XVe siècle. Terre cuite, H. 37,5 cm. Musée du quai Branly
Portrait. Art Yoruba (peuple), XIVe -début XVe siècle. Ife, Nigéria. Bronze, H. 35 cm. British Museum[2].
Figure d'ancêtre Dogon (peuple). Maître des Yeux Obliques. Bois, H. 59 cm. Mali XVIIe – XVIIIe siècle. Pavillon des Sessions, Louvre
Chaise de chef Tshokwé (peuple). XIXe siècle. Bois dur patiné, cuir, clous de laiton. H 68 cm. Musée de Brooklyn
Sommet de sceptre, ivoire. Yombé (peuple), XIXe siècle. Kongo central RDC. Pavillon des Sessions, Louvre
Tapis kuba, velours de raphia. Bushong (peuple) de Mushenge, Kasaï-Occidental, RDC. XIXe
Linden-Museum, Stuttgart
Poulie à tête de bovin. Baoulé (peuple). Bois. Fin XIXe - début XXe siècle. Musée de Brooklyn
Figure de pouvoir Nkisi. Songye (peuple), début XXe siècle. Bois, peau, corne, métal, fibre, verre, perles. H. 89 cm. Lubao, RDC.
Musée de Birmingham
Masque Kwele (peuple), début XXe siècle. Gabon. Pigments sur bois, H. 63 cm[3] no 379. Muséum de La Rochelle.
Masque-costume egungun. XXe siècle. Nigeria, État d'Oyo. Population yoruba. Textile, bois, métal, plastique. H. 120 cm env. Musée des Confluences
Collier. Peuple songhaï. Paille, cire d'abeille, fil de coton. Tombouctou, Mali, avant 1951. Musée des cultures de Bâle[4]
En haut : Collier mporro. XXe siècle. Fibres végétales, perles, boutons. Kenya, population Rendille ou Samburu[5]. En bas : Collier entente, XXe siècle. Cuir, métal, perles. Kenya ou Tanzanie, population Maasaï[6]. Musée des Confluences

L'art africain traditionnel, ou plus exactement l'art de l'Afrique[7] antérieurement à l'art moderne et contemporain de l'Afrique, se manifeste sous une multitude d'arts, souvent associés. La musique et la danse, la réalisation de nombreux types d'objets, sculptés, éventuellement enduits, peints ou produits par assemblage de nombreux éléments, ainsi que les arts du corps (coiffures, parures et peintures corporelles, scarifications, tatouages[8][9]) mais aussi des objets faits à la main, que l'on peut estimer de stricte utilité et même s'ils ne comportent aucune décoration, peuvent présenter un caractère artistique dans l'Afrique traditionnelle[10]. Mais « l'appréciation de « l'art africain » [la sculpture, considérée en dehors de tout contexte culturel] est un phénomène du XXe siècle associé à des artistes et des collectionneurs européens. [...] La notion de « l'art africain » était plus ou moins étrangère aux sociétés d'origine des objets. »[11] Aussi la contextualisation culturelle de l'art africain dans son cadre historique d'origine précis reste un objectif au XXIe siècle.

Le vaste espace de l'Afrique a donné lieu, au cours de son histoire[12], à des pratiques sociales et créations artistiques générées le plus souvent par une certaine population à un moment de son histoire. Certaines de ces créations artistiques ont pu aussi être partagées par plusieurs populations. En raison des déplacements des uns et des autres, de nombreux traits de culture ne sont pas nécessairement spécifiques ni immuables[13]. Récemment, des études précises ont pu remettre en cause l'identité attribuée à certaines populations au XIXe siècle, avec un style artistique spécifique attribué au XXe siècle, comme celui identifié en tant que senufo[14]. La répartition de ces populations est cependant variable, certaines pouvant être homogènes localement, d'autres seront séparées par un ou plusieurs autres peuples, ou parfois dispersées sur un très vaste territoire. Le concept d'ethnie a fait l'objet d'études critiques. Le terme d'« art tribal », proposé par l'anthropologue William Fagg (en)[15] dans les années 1950, mais est cependant encore retenu par Babacar Mbaye Diop en 2018[16], ce qui lui permet d'étudier chaque style tribal constitué par les traits communs à toutes les productions artistiques dans la tribu en question.

Des arts de l'Afrique ancienne il ne reste que des objets pour en témoigner. La plus ancienne céramique d'Afrique subsaharienne apparait vers 10 000 AEC[17], dans l'actuel Mali, sur un site d' Ounjougou recevant les premières moussons après la période dite du Grand Aride, au début de l'Holocène. Ces céramiques portent un décor imprimé[18]. En 2012 les plus anciennes formes de peintures et gravures africaines actuellement datées, l'art rupestre du tassili n'Ajjer ont, environ, 9 à 10 000 ans BP[19]. La recherche archéologique, souvent difficile, continue d'apporter de nouvelles formes d'art ancien, dans leur contexte, ce qui permet de les dater et de les situer au sein de leur culture d'origine pour une meilleure compréhension de l'histoire des habitants d'Afrique.

Le premier théoricien de l'art africain, de l'Afrique (ouest et centre) Carl Einstein, écrit en 1915[20]« Certains problèmes qui se posent à l'art moderne[21] ont provoqué une approche plus scrupuleuse de l'art des peuples africains » [...] « [on a y rarement] posé avec autant de clarté des problèmes précis d'espace et formulé une manière propre de création artistique »[22].

De nombreuses études ne cessent de se pencher sur la réception occidentale des arts africains. Celle-ci repose largement sur le travail initial des ethnologues, puis sur les questions d'esthétique débattues entre artistes et théoriciens, ainsi que sur le travail des marchands d'art et la diffusion de ces formes, enfin avec la passion des collectionneurs. L'ethno-esthétique et la philosophie de l'art se sont emparées de ces questions, en France depuis les travaux de Jacqueline Delange (1967)[3] et Jean-Louis Paudrat (1988)[23].

La conservation d'œuvres d'art africain en musée était autrefois inconnue sur ce continent, les œuvres ayant des vocations religieuses ou politiques, ou une fonction utilitaire dans la vie quotidienne. Paradoxalement, le fait que nombre de ces œuvres aient été conservées sur d'autres continents, notamment en Europe, a permis leur préservation. Le travail préalable à la restitution à l'Afrique de son patrimoine est en cours.

  1. Les reproductions des peintures ont été réalisées en 1956 et 1957 par Henri Lhote et son équipe. Elles sont conservées au Musée de l'Homme. Massif d'Aouanrhet, à proximité de l' Oasis de Djanet et du plateau de Jabbaren, sud de l'Algérie. Henri Lhote À la découverte des fresques du Tassili, Arthaud 1958, p. 88 et 252. Référence : Algérie : Mémoire de pierre. Site du Musée de l'Homme
  2. Page dédiée sur le site du British Museum
  3. a et b Jacqueline Delange, 1967
  4. « Depuis des décennies les femmes, à Tombouctou fabriquent des bijoux en paille et en cire d'abeille. Ces objets ressemblent à des bijoux précieux en or. La forme ressemble à celle d'un bracelet à fermeture répandu au Moyen-Orient entre le XIe et le XIIIe siècle. On la retrouve dans la gamme de bijoux des Peuls - une société de bergers d'Afrique occidentale - sous la forme de rubans en or portés très près du cou. Ceux-ci devinrent si populaires dans la région de Tombouctou que les femmes songhaï s'approprièrent ce type de bijou et le réalisèrent en paille. » : Citation du petit guide de l'exposition Strohgold : kulturelle Transformationen sichtbach gemacht ("Paille d'or : Transformations culturelles rendues visibles") Museum der Kulturen Basel, 2014.
  5. Collier mporro. population Rendille ou Samburu. Ce collier est offert à la femme lors de son mariage. Au premier enfant, elle le complète par une coiffure imposante faite de boue, de graisse et d'ocre. : notice du musée des Confluences. Les Rendille qui vivent dans la partie sud et moins aride de leur région entretiennent depuis toujours de bonnes relations avec leurs voisins les Samburu. En fait, leurs relations ont été si étroites qu’ils ont adopté de nombreuses coutumes et pratiques des Samburu. Les mariages mixtes avec les Samburu ont conduit à l’émergence d’une culture hybride.
  6. Collier entente, population Maasaï. La jeune femme Maasaï porte ce collier lors de son mariage. Il est important qu'il soit neuf et très brillant. : notice du musée. Musée des Confluences, Lyon
  7. Vansina, 1984, p. 1.
  8. Boyer, 2007.
  9. Jacqueline Delange évoque « la cosmétique et la parure (ornementiques du corps), ainsi que l'étiquette et le bien-dire (ornementiques des relations humaines) » (Jacqueline Delange, 1967, p. 39).
  10. Pour l'usage de « tradition », entendue comme « continuité » certainement pas « immuable », mais au contraire, en même temps « changement » : Jan Vansina, Sur les sentiers du passé en forêt. Les cheminements de la tradition politique ancienne de l’Afrique équatoriale [« Paths in the rainforest (1990) »], UCL et Centre Aequatoria, , p. 7 et l'ensemble du livre.
  11. Peter Mark, « Est-ce que l'art africain existe ? », Outre-Mers. Revue d'histoire, no 318,‎ , p. 3-19 (lire en ligne, consulté le ).
  12. Voir aussi l'article détaillé : Histoire de l'Afrique. La grotte de Blombos, Afrique du Sud, a livré des pierres taillées de 75 000 ans, selon la technique de «retouche par pression», à partir de laquelle on date la naissance de l'art, suivant la conception d'objets raffinés non indispensables à la survie du groupe. Catherine Coquery-Vidrovitch, Petite histoire de l'Afrique : L'Afrique au sud du Sahara, de la Préhistoire à nos jours, 2011-2016, p. 31.
  13. Kasfir, One Tribe, One Art ? : Paradigms in the Historiography of African Art. History of Africa, vol 11, 1984, p. 163-193. Repris dans Bamana, Jean Paul Colleyn, 5 Continents 2009, p. 11
  14. Susan Elizabeth Gagliardi et Cleveland Museum of Art (trad. de l'anglais, préf. Constantin Petridis), Senufo sans frontières : La dynamique des arts et des identités en Afrique de l'ouest, Cleveland/Milan/Paris, The Cleveland Museum of Art, et 5 Continents éditions, , 287 p., 30 cm (ISBN 978-88-7439-713-6, BNF 44409115), p. 61 et suivantes : L'identité senufo et ses fondements au XIXe siècle . Cette question concerne aussi le terme « Bambara », qui provient de la transcription française d'un nom donné « de l'extérieur », par les populations de la boucle du Niger (...) : citation tirée de Jean-Paul Colleyn, Bamana, 5 Continents éditions, , 137 p., 23 cm (ISBN 978-88-7439-347-3), p. 7. L'auteur développe précisément les implications de ce court extrait dans les pages suivantes.
  15. William Fagg, Science and Tribal Art (1951: Nature, Vol.168(4287), p. 1099)
  16. Diop, 2018, p. 53 et suivantes
  17. Les plus anciennes céramiques en Afrique subsaharienne sont, en 2009, datées de 9400 AEC : (en) Eric Huysecom, Michel Rasse, Laurent Lespez, Katharina Neumann, A. Fahmy, Aziz Ballouche, Sylvain Ozainne, M. Magetti, Chantal Tribolo et S. Soriano, « The emergence of pottery in Africa durant the 10th millenium calBC: new evidence from Ounjougou (Mali) », Antiquity, no 83,‎ , p. 1-13 (lire en ligne), voire plus encore : quelques tessons fragmentaires, datés en 2012 de ayant été découverts en Afrique de l'Ouest (Mali), Éric Huysecom, « Un néolithique très ancien en Afrique de l'Ouest ? », Pour la science « dossier n. 76 »,‎ , p. 88 (lire en ligne)
  18. François-Xavier Fauvelle (dir.) et al., L'Afrique ancienne : De l'Acacus au Zimbabwe. 20 000 ans avant notre ère - XVIIe siècle, Paris, Belin, coll. « Mondes anciens », , 680 p. (ISBN 978-2-7011-9836-1, BNF 45613885, présentation en ligne), p. 481-482
  19. « Datation des peintures du Tassili au Sahara - Hominidés », sur www.hominides.com (consulté le )
  20. Carl Einstein (trad. de l'allemand par Liliane Meffre), La sculpture nègre [« Negerplastik »], Paris/Montréal (Québec), l'Harmattan, coll. « L'art en bref », , 123 p., 21 cm (ISBN 978-2-7384-7156-7, BNF 37321195), p. 18. Sur le fait que Negerplastik soit considéré comme le premier ouvrage théorique sur l'esthétique des arts de l'Afrique : Yaëlle Biro, 2018, p. 109
  21. Les premiers artistes modernes concernés ont été certains peintre fauves, André Derain, Maurice de Vlaminck, Henri Matisse puis les jeunes cubistes d'alors, Pablo Picasso et Georges Braque.
  22. « Une manière propre de création artistique » : dans le vocabulaire de l'époque Carl Einstein voulait évoquer une manière personnelle de création artistique, qui était propre à l'art africain et à lui seul.
  23. Kerchache, Paudrat, Stéphan, 2008

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