Sturm und Drang

Sturm und Drang /ˈʃtʊɐ̯m ʊnt ˈdʁaŋ/[1] (litt. « tempête et passion ») est un mouvement politique et littéraire allemand de la seconde moitié du XVIIIe siècle. Il correspond à une phase de radicalisation dans la longue période des Lumières (Aufklärung). Le nom de ce mouvement vient d'une pièce de théâtre de Friedrich Maximilian Klinger dont le titre, peut-être provocateur[2], fut soufflé en 1776 par le Suisse Christoph Kaufmann (de), un disciple de Lavater. Une tradition historiographique nationaliste ou influencée par le nationalisme allemand a voulu faire de ce mouvement la révolte (nationale) du sentiment, de l'intériorité contre la superficialité abstraite des Lumières. Depuis un texte publié en 1936 par Georg Lukács sur le roman Les Souffrances du jeune Werther (Die Leiden des jungen Werthers), écrit dans la jeunesse de Johann Wolfgang von Goethe, l'idée d'une rationalité profonde du Sturm und Drang s'est imposée. Les spécialistes actuels définissent les relations de ce mouvement à l'Aufklärung comme critique et dynamisation, à l'intérieur des Lumières, en s'appuyant sur une définition du romaniste allemand Werner Krauss[3].

La première phase du mouvement commence à Strasbourg autour du groupe animé par Herder et Goethe à partir de 1770 et culmine avec les articles du périodique Frankfurter Gelehrte Anzeigen, les essais de Von deutscher Art und Kunst (De la manière et de l'art allemands), le drame historique Götz von Berlichingen et le roman Les Souffrances du jeune Werther. À cette phase historique et esthétique succède en 1775-1776 une phase plus sociale illustrée par les drames de Lenz, Wagner et Klinger. Étant donné la brièveté de la période et le petit nombre de groupes et de protagonistes, la représentation d'un mouvement de jeunes auteurs des années 1770 à 1776 suffit peut-être pour circonscrire la phase collective du Sturm und Drang. Friedrich von Schiller représenterait à lui seul une troisième phase du mouvement, mais les auteurs ont des avis divergents à ce sujet[4].

  1. Prononciation en haut allemand standardisé retranscrite selon la norme API.
  2. Ulrich Karthaus, (de) Sturm und Drang, Munich, Beck, 2000, p. 107. L'expression était aussi une provocation. Étudiant de médecine, Christoph Kaufmann connaissait le sens médical du mot « tempête » au sens de « diarrhée et poussée urinaire ».
  3. Werner Krauss, « Zur Periodisierung Aufklärung, Sturm und Drang, Weimarer Klassik », Sinn und Form, 1,2/1961, p. 76. Le texte de Krauss est reproduit dans Studien zur deutschen und frz. Aufklärung, Berlin, Rütten und Loening, 1963, p. 376-399.
  4. François Genton, « Le drame du Sturm und Drang dans la France de l'Ancien Régime », dans Le Sturm und Drang : une rupture ?, Besançon, 1996, p. 135-168.

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